Séneçon de Jacob : envahissante et toxique !

Séneçon de Jacob : envahissante et toxique !

Le séneçon de Jacob (Jacobaea vulgaris) est une plante herbacée à la beauté fatale : elle peut tuer les humains ainsi que certains autres animaux. Il est donc important de pouvoir être en mesure de la reconnaître pour éviter tout risque de confusion qui pourrait avoir des conséquences dramatiques. Les seuls à pouvoir s’en nourrir sans courir le moindre risque sont certains insectes très spécialisés.

Comment reconnaître le séneçon de Jacob ? 

Le séneçon de Jacob appartient à la famille des Astéracées, une famille caractérisée par une architecture complexe de la fleur, qui forme en réalité un capitule, c’est-à-dire un ensemble de fleurs très petites. Quand on croit voir une fleur, comme c’est le cas de la pâquerette, il y a, si on y regarde de plus près, des dizaines de petites fleurs (les fleurons) : on observe au centre des fleurons dits “tubulés” (en forme de tube) et à l’extérieur des fleurons ligulés, qui porte une languette bien visible à nos yeux. 

Ces deux types de fleurs sont jaunes chez le sénéçon de Jacob, et ressemblent aux capitules du chrysanthème des moissons (Glebionis segetum) ou du solidage verge d’or (Solidago virgaurea, une plante aux propriétés diurétiques ²,³. Le capitule du chrysanthème des moissons est beaucoup plus grand que celui du séneçon de Jacob, et cette espèce est assez rare en France. Quant aux inflorescences du solidage verge d’or, elles sont disposées en grappe tout le long de la tige et les feuilles sont entières, contrairement à celles du séneçon de Jacob qui sont découpées.

Les feuilles du séneçon de Jacob ressemblent à celles de certaines espèces de la famille des Brassicacées, comme les choux et la moutarde sauvage. Pour trancher, il suffit de faire marcher son odorat : si en froissant la feuille, l’odeur est piquante, soufrée, alors il s’agit d’une plante de la famille des Brassicacées, qui sont quasi toutes comestibles.

Le séneçon de Jacob pousse dans les friches, les bois, les chemins, les fossés, les talus, c’est une plante très commune, qui peut même devenir envahissante. Il fleurit de mai à août⁴. 

À savoir que toutes les plantes du genre Senecio sont toxiques. Certaines espèces de séneçon, comme le séneçon commun (Senecio vulgaris) ou le séneçon du Cap (Senecio inaequidens) se rencontrent fréquemment sur notre territoire.

Après la floraison, les graines des séneçons sont surmontées de soies blanches, les aigrettes, qui de façon imagée, rappellent la chevelure blanche des anciens⁵. C’est ce qui a inspiré le nom de genre Senecio, qui vient du latin senex signifiant “vieillard”⁶,.

Quels sont les risques du sénécon de Jacob pour les animaux et les humains ?

Dans les pâtures, vaches et chevaux peuvent brouter ce séneçon et en être victimes. En cause, des composés toxiques présents dans la plante : les alcaloïdes pyrrolizidiniques. Chez les chevaux et les bovins, l’ingestion du séneçon de Jacob porte souvent atteinte au foie, avec des lésions irréversibles⁸ et selon la dose ingérée, peut conduire à la mort de l’animal. Chez le cheval, la dose létale représenterait entre 3 à 7 % de son poids⁸,.,

Les effets sont également dévastateurs sur nous autres humain : son ingestion comporte des risques de cancer du foie et d’obstruction de la veine hépatique¹⁰,¹¹

Les séneçons ne sont pas les seuls à contenir des alcaloïdes pyrrolizidiniques, d’autres espèces de la famille des Astéracées en contiennent également comme les pétasites¹¹, ainsi que des plantes d’autres familles notamment celles des Boraginacées¹² comme la consoude ou le cynoglosse officinale (Cynoglossum officinale)¹³

Le pollen et le nectar de la fleur du séneçon de Jacob contiennent ces composés toxiques, ce qui peut également poser souci dans la production de miel lorsque les abeilles butinent les fleurs¹⁰,¹⁴. D’autres composés du séneçon de Jacob, les lactones sesquiterpéniques, sont impliqués dans des réactions allergiques et provoquent des dermatites¹⁵

Bien que le séneçon de Jacob ait pu être utilisé en médecine traditionnelle¹⁵,¹⁶, et qu’on trouve mention de propriétés notamment anti-inflammatoires, anti-ulcéreuses des feuilles ou encore anti-infectieuses¹⁶, il est aujourd’hui reconnu comme toxique et dangereux pour la santé humaine¹¹.

Une plante toxique sauf pour certains insectes

Si le séneçon de Jacob est donc à bannir de notre consommation, certains êtres vivants lui résistent et profitent même de sa toxicité. C’est le cas de la goutte de sang (Tyria jacobea), un papillon de nuit dont la chenille est zébrée de rouge et de noire, deux couleurs souvent signe de toxicité. Ces chenilles sont armées contre les alcaloïdes pyrrolizidiniques grâce à une enzyme capable de les neutraliser¹⁷. La présence d’alcaloïdes pyrrolizidiniques fait partie des critères de sélection des plantes hôtes, des plantes spécifiques à chaque espèce qui chez les papillons vont nourrir la chenille. 

En se nourrissant de la plante, les chenilles s’accaparent sa toxicité en stockant les composés toxiques dans son organisme. Ils seront toujours présents dans le corps du papillon, lui aussi vêtu de rouge et de noir après la métamorphose¹⁷. Ces couleurs sont également un avertissement synonyme de toxicité et découragent ses éventuels prédateurs. D’autres espèces de papillons et insectes sont spécialisés dans l’extraction de ces alcaloïdes pyrrolizidiniques, comme certains coléoptères de la famille des chrysomèles¹⁸

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Sources

  1. Thomas, R., Maillart, M. & Busti, D. Petite flore de France (NE) Belin (2018).
  2. HMPC. Community herbal monograph on Solidago virgaurea L., herba European Medicines Agency. (2008) Disponible sur : https://www.ema.europa.eu/en/documents/herbal-monograph/final-community-herbal-monograph-solidago-virgaurea-l-herba_en.pdf.
  3. Fleurentin, J. Du bon usage des plantes qui soignent Ouest France (2016).
  4. Tison, J.-M. & de Foucault, B. Flora Gallica. Flore de France Biotope (2014).
  5. Dumas, M. Le sénéçon jacobée Gallica. (2025) Disponible sur : https://gallica.bnf.fr/accueil/fr/html/le-senecon-jacobee.
  6. CNRTL. Séneçon, Seneçon Centre National de Ressources textuelles et lexicales. Disponible sur : https://www.cnrtl.fr/etymologie/sene%C3%A7on.
  7. Gentil. Dictionnaire étymologique de la Flore française P. Lechevalier (1923).
  8. Passemard, B. & Priymenko, N. L’intoxication des chevaux par les séneçons, une réalité en France Rev. Méditerranéenne Vét. 158, 425‑430 (2007).
  9. Delorme, M. & Coudert, P. Intoxications des chevaux par les plantes Actual. Pharm. 56, 49‑51 (2017).
  10. Gottschalk, C. et al. Spread of Jacobaea vulgaris and Occurrence of Pyrrolizidine Alkaloids in Regionally Produced Honeys from Northern Germany: Inter- and Intra-Site Variations and Risk Assessment for Special Consumer Groups Toxins. 12, 441 (2020).
  11. Barnes, J. Pharmacovigilance for Herbal and Traditional Medicines, Advances, Challenges and International Perspectives (2022).
  12. Jung, S. et al. Genetic and chemical diversity of the toxic herb Jacobaea vulgaris Gaertn. (syn. Senecio jacobaea L.) in Northern Germany Phytochemistry. 172, 112235 (2020).
  13. Johnson, A. E., Molyneux, R. J. & Ralphs, M. H. Senecio: A Dangerous Plant for Man and Beast Univ. Libr. 11, (1989).
  14. Watt, T. A. The biology and toxicity of ragwort (Senecio jacobaea L.) and its herbicidal and biological control. Herb. Abstr. 57, 1‑16 (1987).
  15. Pietkiewicz, P., Gornowicz-Porowska, J., Bowszyc-Dmochowska, M. & Dmochowski, M. Human Dermatitis After Skin Exposure to Jacobaea vulgaris and Spectrum of Health Hazards Induced by This Plant to Humans and Livestock J. Agromedicine. 20, 237‑241 (2015).
  16. Grieve, M. A Modern Herbal Cape (1931).
  17. Spohn, M. & Spohn, R. Fleurs et insectes Delachaux et niestlé (2016).
  18. Hartmann, T. & Ober, D. Defense by Pyrrolizidine Alkaloids: Developed by Plants and Recruited by Insects in Induc. Plant Resist. Herbiv. Springer Netherlands (2008).

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