La sève de bouleau : récolter et consommer

En attendant le printemps et le retour de nos plantes sauvages préférées, voilà que commence la saison de la sève de bouleau ! On la récolte principalement sur deux espèces en France, le bouleau blanc (Betula pubescens), et le bouleau pendant (Betula pendula).

Dans cet article, découvrez sa nature, l’origine de sa consommation, ses nombreux usages et toutes les précautions à prendre si vous voulez en extraire vous-mêmes.

Qu’est-ce que la sève de bouleau ?

Un peu à la manière dont nous disposons de vaisseaux sanguins pour transporter l’oxygène de nos poumons vers nos organes, les plantes contiennent des vaisseaux capables de transporter un liquide particulier dans toutes leurs parties, la sève.

Il existe deux types de sèves (1) :

  • La sève élaborée qui contient de l’eau, des sucres et des molécules complexes élaborées lors du processus de photosynthèse. Cette sève circule des feuilles vers les organes qui en ont besoin et on la surnomme aussi ”sève descendante” (car elle va notamment vers les racines).
  • La sève brute, qui contient de l’eau et des minéraux, absorbés par les racines. Cette sève circule des racines vers les feuilles et on l’appelle aussi “sève montante”.

Lorsque l’on parle de sève de bouleau, ou d’eau de bouleau, il s’agit de la sève brute.
On la récolte à la fin de l’hiver, juste avant l’arrivée du printemps et l’arrivée des premières feuilles, lorsque les températures commencent à remonter.
Cette première sève contient également les sucres stockés en réserve pour l’hiver par l’arbre avant de perdre ses feuilles, et vous connaissez probablement au moins un autre arbre dont on ne collecte que la sève brute à la même époque.

Pourriez-vous deviner ?
L’érable bien sûr ! C’est en faisant chauffer et réduire la sève brute que l’on obtient le fameux sirop d’érable que l’on adore mettre sur nos pancakes. Et le fameux beurre d’érable si on chauffe plus longtemps… moins connu en France, c’est un véritable régal ! Il nous faut cependant mettre une nuance, les sèves d’érables de France et d’Europe sont moins concentrés en sucres que ceux du Canada, et nos amis d’Outre-Atlantique sont très bien pourvus en érables à sirops (Acer saccharum) !

L’eau de bouleau, pourquoi tout le monde court après ?

Si l’on parle autant de la sève de bouleau à cette période, ce liquide opalescent, très légèrement sucré, c’est parce qu’on lui attribue des propriétés diurétique, antirhumatismale et dépurative et plus rarement pour favoriser la digestion.

Si on se penche sur la composition de l’eau de bouleau, elle peut être variable entre plusieurs zones géographiques. Un point commun que l’on peut retrouver entre toutes les eaux de bouleau, c’est qu’elle est composée à plus de 95% d’eau, tout simplement !

Comme l’eau d’érable, la sève de bouleau contient des sucres, et principalement du fructose, alors que l’eau d’érable contient principalement du saccharose. Si la quantité est variable entre les régions, on retrouve tout de même entre 1 à 3% glucose et de fructose (2). C’est moins que dans l’eau d’érable, mais en la réduisant on peut tout même obtenir du sirop de bouleau, qui rentre dans les pays baltes dans la composition de boissons aromatisées ou fermentées. Elle contient peut de vitamines et minéraux à l’exception du manganèse.

Mais pour l’heure, ni cette composition, ni aucune étude scientifique ne permet d’affirmer avec certitude que les cures d’eau de bouleau ont toutes les vertus qu’on leur attribue d’ordinaire. Et la sève de bouleau n’a pas les mêmes propriétés que l’écorce ou les feuilles comestibles de bouleau, qui elles ont des usages médicinaux.

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S’il est bon de faire la part des choses, cela reste un produit alimentaire que l’on peut consommer. L’eau de bouleau est parfois recommandée en cure de 2 à 3 semaines à la sortie de l’hiver, à raison d’un verre de 45 à 200 mL par jour. 

A notre connaissance, il n’y a pas de contre-indications à sa consommation chez les adultes en bonne santé. Par son effet diurétique, il vaut mieux prendre certaines précautions en cas de pathologies des reins ou de traitement par des médicaments dont les effets peuvent être impactés par une augmentation de l’élimination rénale. Le bouleau contient également des traces de dérivés salicylés. Ceux-ci ne devraient pas se retrouver dans la sève brute mais il vaut mieux faire attention si l’on est allergique à l’aspirine et ses dérivés.

Vous trouverez l’eau de bouleau dans le commerce, à des tarifs parfois prohibitifs. Sachez qu’il est possible de la récolter vous-mêmes ! 

 

De l’eau de bouleau récoltée soi-même !

Christophe vous explique tout le procédé dans cette vidéo

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Étape 0 : est-ce dangereux pour l’arbre ?

La récolte de sève a un effet à long terme peu étudié sur les arbres (3,4). La pratique ayant été très courante sur une grande partie de l’Europe, de la Russie et de l’Amérique du Nord (5,6), des signes de dommages importants auraient été largement observés s’ils avaient eu lieu.
La récolte de sève bien conduite n’aurait qu’un effet faible ou nul sur la croissance de l’arbre (4,7) mais fait noircir ou rougir le bois au niveau des trous de récolte, pouvant ainsi réduire la qualité du bois comme matériau de menuiserie voire débuter la décomposition interne de l’arbre à long terme (3).

Étape 1 : choisir le bon moment

Le bon moment pour collecter la sève de bouleau dépend de votre région, et des écarts de températures. En effet, c’est à la fin de l’hiver, lors du dégel, que l’arbre se réveille et recommence à pomper l’eau du sol. Dès lors que les premières feuilles apparaissent, le flux va réduire et il sera trop tard ! Vous avez donc une fenêtre d’environ 3 semaines pour réaliser l’opération.

Étape 2 : choisir le bon bouleau

Le bouleau est reconnaissable à son écorce claire, qui peut s’enlever en faisant des lambeaux

Pour des questions de législation, vous ne pouvez pas prélever sur n’importe quel arbre dans des forêts ou des bois publics. L’idéal est d’avoir un bouleau chez vous, ou sur un terrain dont le propriétaire vous autorise à tirer la sève.
Privilégiez les bouleaux âgés et vigoureux, dont le tronc a un diamètre d’au moins 30 cm. Chez ces bouleaux adultes, vous pourrez récolter 1 à 10 litres de sève par jour.

Étape 3 : récolter sa sève

Pour que la sève s’écoule, il faut percer un trou dans l’écorce.

  • Faites un trou d’environ 2 à 3 cm, de biseau, vers le sol, à l’aide d’une perceuse, d’une chignole ou d’une vrille.
  • Accrochez ensuite une bouteille propre au tronc, quelques centimètres en dessous du trou percé (à l’aide d’un crochet planté dans l’écorce ou d’une ficelle enroulée autour du tronc).
  • Insérez une petite branche ou une paille au niveau du trou, pour permettre à la sève de couler directement dans la bouteille. Vous pouvez aussi découper un petit triangle, pointe en bas, dans l’écorce juste sous le trou et le faire rebiquer.

Étape 4 : conserver sa sève

La sève se récolte tous les jours dans votre bouteille, afin d’éviter qu’elle ne fermente. De retour chez vous, transvasez le liquide dans une bouteille que vous aurez préalablement stérilisée, et conservez-la au frigo. Il est possible de conserver cette sève fraîche jusqu’à quelques jours seulement.

Étape 5 : utiliser sa sève

Pour consommer votre sève de bouleau, plusieurs options s’offrent à vous. Vous pouvez la boire fraîche, la mélanger à d’autres boissons ou encore la faire réduire en sirop.
Il faut environ 100 litres d’eau de bouleau pour faire 1 litre de sirop, alors accrochez-vous !

Étape 6 : terminer sa récolte

À la fin de votre récolte, l’idéal est d’appliquer une couche d’argile, de cire d’abeille ou de résine de pin (ou même de goudron de bouleau) sans en tasser dans le trou.
Autrement, vous pouvez reboucher le trou avec un morceau de bois de bouleau ou une cheville d’un diamètre légèrement plus important que le trou. Coupez la partie qui dépasse puis recouvrez de cire, de résine et/ou d’argile pour aider la cicatrisation et protéger l’arbre des parasites puisque vous avez abîmé sa première barrière de défense contre toutes sortes de champignons et de petites bêtes !

Rappelez-vous, si vous récoltez cette sève vous-mêmes, il vous faut nettoyer vos outils et travailler proprement pour éviter un maximum d’infecter l’arbre ! Si vous préférez éviter de généraliser cette pratique, il existe d’autres plantes qui poussent à cette période et qui ont les mêmes utilisations que la sève de bouleau, telles que l’ortie ou la prêle pour leurs propriétés anti-inflammatoires et drainantes.

sève de bouleau
Sève de bouleau, le précieux liquide opalescent !

Les dérives de la sève de bouleau

Depuis quelques années, les récoltes sauvages de sève se multiplient. Elles sont parfois réalisées par des amateurs, pour la vente ou un usage personnel. Ces deux pratiques sont interdites dans les espaces publics, incluant les forêts domaniales. Vous faire prendre en flagrant délit peut donner lieu à une amende. Si vous voulez tout de même essayer, cantonnez-vous aux arbres de votre propriété 🙂
Des pratiques abusives nuisent à la croissance et à la santé des arbres et peuvent engendrer des contaminations localement. Pensez-y !

Si vous achetez de l’eau de bouleau en magasin, assurez-vous qu’elle vienne d’une filière certifiée qui respecte les exploitations de bouleau.

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Références

1. Raven, P., Evert, R., Eichhorn, S. & Bouharmont, J. Biologie végétale. (De Boeck, 2015).

2. Łuczaj, Ł., Bilek, M. & Stawarczyk, K. Sugar content in the sap of birches, hornbeams and maples in southeastern Poland. Open Life Sci. 9, 410–416 (2014).

3. Trummer, L. & Malone, T. Some impacts to paper birch trees tapped for sap harvesting in Alaska. Univ. Alsk. (2009).

4. Ouimet, R., Guillemette, F., Duchesne, L. & Moore, J.-D. Effect of tapping for syrup production on
sugar maple tree growth in the Quebec Appalachians. Trees. 35, 1‑13 (2021).

5. Svanberg, I. et al. Uses of tree saps in northern and eastern parts of Europe. Acta Soc. Bot. Pol. 81,
343‑357 (2012).

6. Moerman, D. E. Native American Ethnobotany. Timber Press (1998).

7. Maher, K. A. C. Birch, berries, and the boreal forest: Activities and impacts of harvesting non-timber forest products in interior Alaska. University of Alaska Fairbanks (2013).

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